Combats clandestins

27e jour du deuxième mois d’hiver, an 1138

Mékyle s’appuyait nonchalamment contre le bois de son comptoir et regardait la salle de son établissement. Comme tous les soirs, l’Oie Grasse était à son comble et ses serveuses s’occupaient de la clientèle comme il se devait. Le tavernier, pour sa part, surveillait que rien de fâcheux n’advienne, pour prévenir tout risque de bagarre, et il laissait traîner ses oreilles un peu partout autour de lui.

Assis au comptoir, deux hommes buvaient et discutaient dans le bruit ambiant qui couvrait en grande partie leurs voix. Le premier offrait son troisième verre à son compagnon qui s’étonnait de sa soudaine richesse.

« D’où tu sors tout ça ? Depuis quand t’as autant d’argent à dépenser dans l’alcool ? »

« Ah ça c’est grâce à Flesh ! Il a été brillant hier soir. »

« Tu vas encore là-bas ? Ça t’as pas suffit la dernière fois ? Et ta femme elle en dit quoi de tes paris ? »

« Parce que tu crois que je lui dis ce que je fais ? Attends avec la merde qu’elle m’a chié l’autre fois je dis plus rien, pas fou ! Elle croit que je bois un coup ici avec toi et c’est très bien comme ça ! »

« Merci de m’avertir » répliqua l’autre « Si elle m’avait demandé t’aurait eut l’air con. »

« Ouais bah maintenant tu sais alors déconne pas hein ! »

« Tu sais qu’un jour vous allez vous faire choper avec ces foutus combats de chèvre. »

« D’abord, c’est des boucs, et puis j’vois pas le mal. L’Autorité n’aime pas juste parce qu’elle n’a pas de taxe sur les paris, c’est tout. »

« Peut-être mais si la Garde vous attrape, vous et vos biquettes, vous ne pourrez pas vous défendre juste avec ça. »

« Bah ! Il faudrait encore qu’ils nous trouvent ces empotés. »

L’homme sourit d’un air narquois et leva son verre à l’adresse de son compagnon avant de boire. Son ami ne répondit pas et but aussi, après tout, c'était les biquettes qui payaient.